24 avril, 2025
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Canal de Panama: navigation en eaux troubles entre Chine et Trump

« Le canal n’est contrôlé, directement ou indirectement, ni par la Chine, ni par les États-Unis, ni toute autre puissance. Le canal appartient et continuera d’appartenir au Panama ». Cette récente déclaration vient de José Raul Mulino, l’actuel président panaméen.

L’Autorité du canal de Panama (ACP), un organisme autonome panaméen, gère officiellement cette voie navigable interocéanique qui s’étend sur 80 km. Selon la Constitution nationale, le canal « représente un patrimoine inaliénable de la nation panaméenne » et il est accessible aux navires « de toutes les nations ».

Panama: les eaux troubles du canal et la Chine qui dérange Trump

Chaque année, plus de 11 000 bateaux traversent ce canal. Globalement, il constitue 5% du commerce maritime à l’échelle mondiale. Il faut environ huit heures aux navires pour passer d’un océan à l’autre sans nécessité de contourner le Cap Horn, situé à la pointe méridionale de l’Amérique. Ainsi, un navire économise 20 300 km en faisant le trajet de New York à San Francisco.

Pourquoi tant de battage sur cette voie de passage?

La gestion du canal a été déléguée au Panama uniquement en 1999, suite à un traité signé en 1977 par Jimmy Carter. Pour Trump, Carter a commis une grave erreur en ce sens que, en 1903, les États-Unis avaient signé un traité leur garantissant la propriété exclusive et perpétuelle de la région du canal, qui a été officiellement ouverte par les Américains le 15 août 1914.

Panama: les eaux troubles du canal et la Chine qui dérange Trump

De manière informelle, il est réputé que pour garantir un contrôle absolu du canal, les États-Unis se donnent une concession éternelle et la souveraineté sur une étendue de 8 km de chaque côté du parcours, ainsi qu’une capacité d’intervention dans les affaires panaméennes.

Le prix politique a payer

L’enjeu des droits de passage est crucial pour les États-Unis, étant donné que 74% du fret total transporté par le canal provient de ce pays. Quant aux produits chinois, ils ne représentent que 21 %.

Selon Trump, les navires américains devraient régler un prix inférieur pour leur passage. Le tarif des péages est déterminé par le gouvernement du Panama, en tenant compte des exigences du canal et de la demande du commerce mondial. Le prix est fixé en fonction de la capacité de chargement des bateaux, plutôt qu’en raison du pays d’origine.

Panama: les eaux troubles du canal et la Chine qui dérange Trump

Et les Chinois dans tout ca?

Depuis l’attribution d’un contrat en 1997, la gestion des ports stratégiques de Balboa et Cristobal, qui se trouvent aux deux bouts du canal, sur les côtés Atlantique et Pacifique, est assurée par Panama Ports Company (PCC). Cette concession a été prolongée pour une durée supplémentaire de 25 ans en 2021. PCC est une filiale de Hutchinson Ports, qui appartient à la société holding CK Hutchison fondée par le milliardaire chinois Li Ka-Shing. Cet opérateur portuaire de premier plan, situé à Hong Kong, gère au total 53 ports disséminés dans 24 nations.

D’après un reportage du New York Times, aucune relation directe n’a été établie entre CK Hutchison et le Parti communiste chinois. Toutefois, pour Trump, l’administration de ces deux ports canaux soulève des préoccupations sécuritaires en raison des connexions de sa société mère avec la Chine.

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Sous l’influence des États-Unis, le gouvernement du Panama avait déclaré la semaine dernière qu’il procéderait à une réévaluation de l’accord par une vérification approfondie de la Panama Ports Company pour s’assurer de la conformité aux termes des concessions.

De son cote, le government chinois affirme respecter la souveraineté du Panama sur la voie maritime, tout en multipliant d’autres projets dans le pays comme la construction d’un port pour bateaux de croisières à l’entrée du canal côté Pacifique et un projet de pont enjambant la voie maritime pour un montant de 1,4 milliard de dollars…

Panama: les eaux troubles du canal et la Chine qui dérange Trump

Quid de la vente des deux ports chinois sur le canal?

Entre temps, le chinois CK Hutchison a annoncé le 4 mars avoir conclu des accords de principe avec un consortium composé de BlackRock, dirigé par les États-Unis, et du groupe TiL, filiale de MSC Croisières. L’accord, d’une valeur totale de 23 milliards de dollars, porte sur la vente de 80 % des parts de CK Hutchison dans 43 ports situés dans 23 pays hors Chine. Hutchison a également annoncé la vente de 90 % des parts de la société panaméenne qui exploite les terminaux de Balboa et Cristobal, à chaque extrémité du canal.

Le quotidien South China Morning Post et d’autres journaux sous contrôle chinois rapportent aujourd’hui que la date butoir du 2 avril pour la signature des documents définitifs ne sera pas respectée. Les autorités chinoises ont indiqué que l’Administration d’État pour la régulation des marchés devait examiner la transaction. Pour le moment l’accord de vente au fond américain et à MSC n’est pas annulé et ce retard va sûrement énerver le président américain…

Panama: les eaux troubles du canal et la Chine qui dérange Trump

Une réserve sur la documentation juridique

Hutchison a déclaré que les « termes fondamentaux et essentiels » des deux transactions avaient été convenus en principe, sous réserve de la documentation définitive. La société a indiqué que la documentation définitive relative à la partie panaméenne de la transaction devrait être signée au plus tard le 2 avril. Elle a également conclu des accords exclusifs de négociation et de confidentialité avec le consortium BlackRock-TiL.

L’intervention américaine déplaît au gouvernement chinois

Les responsables chinois ont réagi négativement à l’annonce de la vente, y voyant une intervention américaine et craignant des menaces pour le transport maritime et le commerce chinois. Selon les médias, la Chine a accru la pression sur CK Hutchison, notamment par des informations cette semaine selon lesquelles le gouvernement aurait ordonné l’interdiction de tout nouveau contrat avec Li Ka-shing, le milliardaire hongkongais qui contrôle Hutchison, et sa famille.

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La société hongkongaise doit attendre l’accord du gouvernement chinois

Des médias asiatiques ont suggéré que des discussions en coulisses avaient lieu entre l’entreprise et des représentants du gouvernement de Hong Kong. Hutchison a refusé de commenter publiquement et a également annulé une réunion d’information avec les investisseurs prévue après la publication de son rapport financier de fin d’année.

Trump avait salué l’accord concernant les ports panaméens et a attribué le mérite à BlackRock pour sa concrétisation. MSC est resté discret sur l’accord, laissant BlackRock au centre de l’attention des médias.

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