Dans l’industrie hôtelière, la relation entre les hôteliers et les agences de voyage en ligne (OTA) comme Booking.com ou Expedia évoque une forme de syndrome de Stockholm. Malgré les frustrations liées aux commissions élevées et aux contraintes imposées, de nombreux hôteliers restent attachés à ces plateformes, craignant de perdre leur visibilité et leurs réservations. Nous avons été inspirés par l’article publié par le site allemand spécialisé Tageskarte. Il y a des solutions pour que les hôteliers retrouvent leur autonomie.

Une emprise grandissante des OTA
Les OTA dominent aujourd’hui le marché de la réservation hôtelière. En Europe, leur part de marché est passée de 19,7 % en 2013 à près de 30 % en 2019, selon HOTREC, tandis que les réservations directes ont reculé. Cette croissance s’explique par la commodité offerte aux clients et la visibilité mondiale qu’elles procurent aux hôtels, en particulier aux établissements indépendants. Cependant, cette dépendance a un coût : des commissions pouvant atteindre 30 % par réservation, qui amputent les marges des hôteliers.
Cette relation toxique repose sur la peur de l’effondrement des réservations et sur une commodité qui masque une perte progressive d’autonomie.

Les hôteliers ont peur d’être invisible
La principale raison de cette dépendance est la crainte de perdre des clients. Les OTA offrent une vitrine mondiale que peu d’hôtels, surtout les plus petits, peuvent égaler seuls. Cette peur est amplifiée par le manque de confiance en leurs propres capacités à attirer des réservations directes. Pourtant, un hôtel doté d’une identité forte et d’une stratégie marketing bien pensée peut rivaliser avec les OTA, à condition d’investir dans ses propres canaux.
Une commodité séduisante mais coûteuse
Les OTA simplifient la gestion des réservations grâce à des plateformes intuitives et des outils de marketing performants. Cependant, cette facilité a un prix : les hôteliers cèdent le contrôle de leurs données clients et de leur stratégie tarifaire. De nombreux hôtels négligent leur site web, souvent peu attractif ou mal optimisé, ce qui pousse les clients vers les OTA. Cette passivité renforce la dépendance, transformant les hôteliers en simples exécutants des règles dictées par les plateformes.
Une relation inégale
Les OTA imposent des conditions strictes, comme auparavant la parité tarifaire, qui empêchait les hôtels de proposer des prix plus bas sur leur propre site. De plus, certaines plateformes achètent des chambres à bas prix via des grossistes, ce qui leur permet d’afficher des tarifs inférieurs à ceux des hôtels, créant une concurrence déloyale. Selon OTA Insight, les grandes chaînes hôtelières perdent en moyenne 50 % de leurs réservations à cause de ces pratiques.
Une érosion des marges financières
Les commissions élevées des OTA, souvent comprises entre 15 et 30 %, réduisent considérablement les bénéfices des hôtels. Pour un établissement générant 1 million d’euros de chiffre d’affaires via les OTA, cela représente jusqu’à 300 000 euros de frais. Ces coûts limitent les investissements dans l’amélioration des infrastructures ou la formation du personnel, freinant le développement à long terme.

Une perte de lien avec les clients
En s’appuyant sur les OTA, les hôteliers perdent l’accès direct à leurs clients. Les plateformes contrôlent les données des réservations, empêchant les hôtels de construire des relations durables ou de personnaliser leurs offres. Cette déconnexion affaiblit la fidélité des clients, qui se tournent plus facilement vers les OTA pour leurs prochaines réservations.
Une fragilité face aux crises
La pandémie a révélé la vulnérabilité des hôtels dépendants des OTA. Lorsque la demande s’est effondrée, les plateformes ont imposé des politiques d’annulation strictes, laissant les hôteliers assumer seuls les pertes. En revanche, les clients ayant réservé directement se sont montrés plus flexibles, soulignant l’importance d’un lien direct avec la clientèle.
Il est nécessaire de moderniser sa présence en ligne
Pour réduire leur dépendance, les hôteliers doivent investir dans un site web moderne, optimisé pour le référencement (SEO) et équipé d’un système de réservation simple et sécurisé. Des outils comme ceux d’OTA Insight permettent de surveiller les tarifs des concurrents et d’ajuster les prix en temps réel. Un site attrayant, combiné à une stratégie de contenu sur les réseaux sociaux, peut attirer davantage de réservations directes.

Miser sur la fidélisation
La fidélisation est essentielle pour contrer l’influence des OTA. Les programmes de fidélité, les offres exclusives pour les réservations directes (comme des surclassements ou des réductions) et une communication personnalisée renforcent les liens avec les clients. Une étude de Cornell University montre que les clients réservant directement sont 9 % plus susceptibles de revenir dans le même établissement. Les grandes chaînes hôtelières ont compris la nécessité de garder le client avec leur programme de fidélisation et des sites de réservation efficaces. On peut citer Accor Hotels, Hilton, Marriott, Choice .

Diversifier les canaux de distribution dont les agences de voyage
Les hôteliers doivent explorer d’autres canaux pour réduire leur dépendance aux OTA. Les partenariats avec des agences de voyage, les campagnes publicitaires ciblées ou les collaborations avec des sites d’informations touristiques comme Mistertravel peuvent générer des réservations sans passer par les plateformes. En Suisse, la campagne « Le meilleur deal, c’est directement à l’hôtel » de HotellerieSuisse a encouragé les réservations directes, prouvant l’efficacité d’une communication proactive.
Négocier avec les OTA
Plutôt que de rompre totalement avec les OTA, les hôteliers peuvent chercher à renégocier les termes de leur partenariat. Par exemple, certains établissements obtiennent des commissions réduites en échange d’une meilleure visibilité sur la plateforme. Une analyse rigoureuse des performances des OTA permet d’identifier les canaux les plus rentables et de limiter l’exposition aux plateformes moins performantes.
Un avenir plus autonome pour les hôteliers
La dépendance aux OTA n’est pas une fatalité. En adoptant une approche stratégique, les hôteliers peuvent transformer leur relation avec ces plateformes, passant d’une soumission contrainte à un partenariat équilibré. Investir dans une présence numérique robuste, renforcer la fidélité des clients et diversifier les canaux de distribution sont des étapes clés pour retrouver une autonomie durable.
Un hôtel qui mise sur son identité unique et sur des relations directes avec ses clients gagne non seulement en rentabilité, mais aussi en résilience face aux fluctuations du marché. L’avenir de l’hôtellerie repose sur un équilibre entre l’utilisation intelligente des OTA et le développement de stratégies indépendantes, permettant aux hôteliers de redevenir maîtres de leur destin.