À l’aube de la saison touristique estivale 2025, la Turquie fait face à une crise sans précédent : les autorités ont ordonné la fermeture de plus de 4000 hôtels pour non-conformité administrative. Cette décision, prise par le ministère turc de la Culture et du Tourisme, a semé le chaos parmi les voyageurs et les professionnels du secteur, mettant en péril le démarrage de la haute saison. Les vacanciers qui avaient réservé via une agence de voyages bénéficient soit d’un remboursement, soit d’une nouvelle proposition de séjour!
Une opération de régularisation stricte
Le 21 janvier 2025, un incendie tragique dans un hôtel de la station de ski de Kartalkaya, dans la province de Bolu, a coûté la vie à 76 personnes, révélant des failles graves dans les normes de sécurité. En réponse, le ministère turc de la Culture et du Tourisme a lancé une vaste campagne d’inspection visant à vérifier la conformité des hôtels aux réglementations nationales, notamment en matière de sécurité incendie, de permis d’exploitation et de respect de la législation touristique. Selon le ministre Mehmet Nuri Ersoy, 4 380 hôtels ont été fermés, contre seulement 100 au cours des 40 dernières années, soulignant l’ampleur de cette opération.
Non-conformité administrative : la cause principale
Les inspections ont ciblé des aspects cruciaux : licences d’exploitation, conformité aux normes de sécurité et respect des réglementations fiscales. De nombreux hôtels, en particulier des établissements indépendants ou de petite taille, n’ont pas renouvelé leurs certificats d’exploitation à temps, souvent en raison d’un manque de personnel ou de ressources pour se mettre en conformité. Cette rigueur administrative, bien que justifiée par des impératifs de sécurité, a été critiquée pour son caractère brutal et son timing, juste avant la saison estivale.

Impacts immédiats sur le tourisme
Avec 52,6 millions de visiteurs étrangers en 2024, la Turquie est la cinquième destination mondiale. Cependant, la fermeture soudaine de 4000 hôtels a laissé des milliers de touristes dans l’embarras. De nombreux voyageurs, ayant réservé via des plateformes en ligne, ont découvert à leur arrivée que leur hébergement était fermé. Selon Serdar Karcılıoğlu, président de l’Association des hôteliers de Bodrum, seuls 200 établissements pourraient rouvrir avant l’été, aggravant la pénurie d’hébergements dans des régions clés comme Antalya, Bodrum et Istanbul.
Un chaos pour les professionnels du tourisme
Les hôteliers dénoncent une décision prise « derrière un bureau, sans connaissance du terrain », selon Serdar Karcılıoğlu. À Bodrum, où le tourisme balnéaire est un pilier économique, la saison 2025 est déjà considérée comme « perdue » pour de nombreux établissements. Les hôtels fermés ont été retirés des plateformes de réservation comme Booking.com, rendant impossible toute nouvelle réservation. Cette situation affecte non seulement les hôteliers, mais aussi les agences de voyage, les guides et les commerces locaux dépendants du tourisme.

Une économie sous pression
La Turquie, dont le tourisme représente 12,65 % du PIB attendu en 2028, traverse une période économique difficile, marquée par une inflation de 39,05 % en février 2025 et un déficit commercial de 82,1 milliards de dollars en 2024. La fermeture des hôtels aggrave cette instabilité, privant le pays de recettes vitales en devises étrangères. Les troubles politiques, comme les manifestations de mars 2025 contre l’arrestation du maire d’Istanbul, Ekrem İmamoğlu, et les alertes terroristes, ont également freiné les réservations européennes
Une baisse de fréquentation préexistante
Même avant cette crise, certaines régions, comme Bodrum, avaient enregistré une baisse de 10 % de la fréquentation touristique en 2024 par rapport à 2023. Les grands événements européens, comme l’Euro 2024 et les JO de Paris, ont détourné une partie des visiteurs. Cette nouvelle vague de fermetures risque d’accentuer la désaffection, notamment pour les touristes européens, qui représentent une part croissante des visiteurs.
Une régularisation sous pression
Le ministère turc travaille à accélérer la délivrance des certificats pour permettre à certains hôtels de rouvrir. Cependant, avec seulement 200 établissements susceptibles de se conformer avant l’été, la capacité hôtelière restera limitée. Les autorités envisagent des dérogations temporaires pour les régions les plus touchées, mais ces mesures restent incertaines face aux exigences de sécurité renforcées post-Kartalkaya.
Conseils aux voyageurs
Pour éviter les désagréments, les voyageurs sont invités à vérifier la validité de leur réservation auprès des hôtels ou des agences. Le ministère français des Affaires étrangères recommande également une vigilance accrue en raison des troubles politiques et des risques d’alcool frelaté dans les zones touristiques. En cas de doute, privilégier des hôtels affiliés à des chaînes internationales ou ayant des certifications récentes est conseillé.
Si cette mesure vise à protéger les visiteurs après des incidents tragiques, elle compromet la saison estivale, laissant des milliers de touristes sans hébergement et les professionnels dans l’incertitude. Pour préserver son attractivité, la Turquie devra conjuguer rigueur réglementaire et soutien au secteur touristique, tout en rassurant les voyageurs internationaux. Les vacanciers sont appelés à redoubler de prudence lors de la planification de leur séjour pour éviter les mauvaises surprises.