Depuis plus d’une décennie, les Antilles françaises, en particulier la Martinique et la Guadeloupe, sont confrontées à l’invasion massive des algues sargasses. Ces algues brunes, qui s’échouent sur les côtes, perturbent la vie des habitants, menacent la santé publique et nuisent gravement au tourisme, pilier économique de la région. En 2025, le phénomène atteint des proportions alarmantes, comme en témoigne la réunion d’urgence organisée par le préfet de la Martinique le 24 juin avec les maires des communes touchées.
Un phénomène en expansion
Les sargasses, algues pélagiques flottant en surface, proviennent principalement du « Sargassum Belt », une zone située entre l’Afrique et l’Amérique du Sud. Depuis 2011, leur prolifération s’est intensifiée en raison de trois facteurs majeurs : la pollution des fleuves sud-américains, comme l’Amazone, qui rejettent des nutriments (nitrates, phosphates) favorisant leur croissance ; le réchauffement climatique, qui élève la température des eaux ; et des changements dans les courants marins, qui transportent ces algues jusqu’aux Antilles. Une étude de l’IRD, publiée en juin 2025, confirme qu’une anomalie climatique en 2009-2010 a déclenché un effet domino, dispersant les sargasses vers des zones tropicales propices à leur développement.

En 2025, la Martinique et d’autres îles font face à une invasion sans précédent
Selon le préfet Étienne Desplanques, 4 500 tonnes d’algues ont été collectées en mer depuis janvier, contre 1 500 tonnes en 2024 à la même période. Des échouages massifs, observés dès mars, touchent particulièrement les côtes atlantiques, comme Le Robert, Le Vauclin et Sainte-Marie. Météo-France prévoit une intensification des arrivages entre juin et août, avec 31 millions de tonnes de sargasses dérivant dans l’Atlantique. En Guadeloupe, des îles comme La Désirade voient leurs ports bloqués, paralysant l’économie locale. Le site France Antilles a évoqué dans un article le rapport accablant de la Cour des Compte

Des impacts dévastateurs sur les habitants
Inoffensives en mer, les sargasses deviennent toxiques une fois échouées. Leur décomposition, dans les 48 heures, libère de l’hydrogène sulfuré et de l’ammoniac, des gaz nauséabonds et dangereux. Ces émanations provoquent des troubles respiratoires, des maux de tête, des nausées et, à long terme, des effets encore mal étudiés. En Martinique, des écoles, comme un collège au Robert, ont fermé temporairement en 2025 en raison des émanations toxiques. À Capesterre-de-Marie-Galante, près de 10 % des habitants ont fui les zones côtières. Les appareils électroménagers, corrodés par ces gaz, aggravent les difficultés des riverains
Perturbations du quotidien
Les sargasses obstruent les ports, empêchant les pêcheurs de travailler, car les algues endommagent les moteurs des bateaux. À La Désirade, l’accès maritime à la Guadeloupe a été suspendu, isolant l’île et affectant son approvisionnement. Les plages, couvertes d’algues, deviennent impraticables, transformant des « paradis » en « paysages de désolation », selon des habitants de Sainte-Marie. Ces conditions alimentent la frustration des populations, certaines envisageant des actions judiciaires contre l’État pour inaction. En avril, Ouest France avait évoqué le problème dans cet article
Un coup dur pour le tourisme
Le tourisme, représentant une part essentielle de l’économie antillaise, souffre gravement. En 2015, la Guadeloupe a enregistré une baisse de 40 % du chiffre d’affaires touristique, avec un préjudice de 5 millions d’euros. En 2025, des plages emblématiques, comme Grande Anse ou Le Diamant en Martinique, ont été temporairement envahies, dissuadant les visiteurs. Les touristes, inquiets des odeurs et des risques sanitaires, évitent les zones touchées, comme Marie-Galante, où des hôtels ont fermé. Mistertravel a alerté sur l’impact global, notant des échouages similaires en Floride et au Mexique.
Des solutions pour les visiteurs
Malgré la crise, certaines zones restent préservées. En Martinique, les plages de la côte caraïbe, comme Anse Noire ou Les Salines, sont généralement épargnées grâce à leur exposition à l’ouest. En Guadeloupe, Deshaies, Bouillante et Les Saintes offrent des alternatives sûres pour la baignade et les activités nautiques. Les voyageurs sont encouragés à consulter les cartes des échouages en temps réel, comme celles de Météo-France, et à louer des véhicules pour explorer les zones non affectées. Le site Jumbocar peut vous donner des conseils sur les plages qui ne subissent pas les sargasses
Les autorités réagissent toujours trop tardivement
Le 24 juin 2025, le préfet de la Martinique, Étienne Desplanques, a réuni les maires des communes touchées, dont Le Robert et Le Vauclin, pour coordonner la lutte contre les sargasses. Cette réunion, qualifiée de tardive par certains observateurs, vise à renforcer les moyens de collecte et à créer une cellule de coordination pilotée par le sous-préfet du Marin, avec des points réguliers toutes les 48 heures. Une sortie en mer avec le maire du Robert a permis d’évaluer les barrages flottants, mais les habitants, comme ceux du collectif anti-sargasses, expriment leur scepticisme face à des mesures jugées insuffisantes.

Des lacunes dans la gestion
Un rapport de la Chambre régionale des comptes, publié le 5 juin 2025, dénonce une gestion « chaotique » en Martinique. Les communes manquent de plans actualisés, comme au Robert, où le Plan Communal de Sauvegarde n’a pas été révisé depuis 2018. Le matériel de ramassage, financé par des fonds publics, est sous-utilisé, et les volumes collectés ne sont pas mesurés précisément. Les barrages flottants, bien qu’efficaces dans certains cas, sont coûteux et peu fiables, comme à La Désirade en Guadeloupe. Saint-Barthélemy, avec une stratégie autofinancée, fait figure d’exception.
Défis et solutions à long terme
La coordination reste un défi majeur. La CRC souligne l’absence de cadre juridique clair, compliquant l’action des maires, déjà en difficulté financière. Une reconnaissance du phénomène comme catastrophe naturelle, demandée par des élus comme Samuel Tavernier au François, est rejetée par l’État, qui considère les échouages comme récurrents. À long terme, réduire la pollution des fleuves sud-américains et lutter contre le réchauffement climatique sont essentiels, mais nécessitent une coopération internationale. Des prévisions saisonnières, comme celles de l’IRD, permettent d’anticiper les échouages jusqu’à sept mois, offrant un outil précieux pour la planification.
Conseils aux voyageurs et habitants
Pour les touristes
Vérifiez les prévisions d’échouages sur meteofrance.mq ou un spécialiste des îles comme Exotismes avant de planifier votre séjour. Privilégiez les plages de la côte ouest, moins exposées, et réservez via des agences fiables pour des activités adaptées. Une assurance voyage couvrant les désagréments liés aux sargasses peut être utile.
Pour les habitants
Protégez-vous des gaz toxiques en évitant les zones d’échouage et en signalant les dépôts aux autorités. Les collectifs, comme celui du Robert, peuvent amplifier vos préoccupations. Conservez les preuves de dommages (électroménagers, santé) pour d’éventuelles démarches judiciaires.
Il faut signaler une association qui se bat contre le fléau des algues Sargasses : Sargassummonitoring
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