Merlin Entertainments, le géant mondial des attractions touristiques, traverse une période de turbulences financières qui pourrait bien ébranler ses joyaux de la couronne : les parcs Legoland et les célèbres musées de cire Madame Tussauds.

Propriétaire d’une constellation de sites emblématiques – des parcs à thème aux aquariums en passant par les châteaux hantés –, le groupe britannique, racheté par le fonds d’investissement Blackstone en 2019 pour 7,08 milliards d’euros, accumule les pertes et les dépréciations d’actifs.

Alors que l’industrie du divertissement post-pandémie peinait déjà à retrouver son souffle, les résultats annuels de 2024 révèlent un tableau alarmant : une perte nette de 736 millions d’euros, une dette nette gonflée à 6,346 milliards d’euros, et des pertes massives touchant directement ses marques phares. Ces difficultés fragilisent l’avenir de ces attractions adorées des familles du monde entier.

Un bilan 2024 catastrophique : pertes et dépréciations en cascade
L’année 2024 a été un véritable cauchemar pour Merlin Entertainments. Le chiffre d’affaires a chuté de 3,2 % à 2,427 milliards d’euros, tandis que le bénéfice opérationnel sous-jacent a plongé de 481 à 336 millions d’euros, pour aboutir à une perte opérationnelle totale de 156 millions d’euros.

La cerise sur le gâteau ? une perte nette de 736 millions d’euros, principalement due à une dépréciation exceptionnelle de 736 millions sur les investissements dans les filiales, reflétant des conditions de marché plus dures que prévu et une reprise économique plus lente. Ces chiffres contrastent avec une année 2023 encore bénéficiaire, et s’inscrivent dans une spirale descendante : dès juillet 2025, des analystes évoquaient déjà une perte de 580 millions d’euros pour l’exercice clos, soulignant l’ampleur du choc.

Les dépréciations d’actifs, totalisant 453 millions d’euros, sont particulièrement révélatrices
Elles incluent 225 millions sur les actifs immatériels (notamment les marques), et touchent de plein fouet les segments clés du groupe. la dette, quant à elle, continue de peser lourd : avec 6,346 milliards d’euros de dette nette, Merlin fait face à des frais d’intérêt croissants, aggravés par une notation de crédit dégradée à « ccc » par S&P en août 2025, qualifiant les parcs de « fatigués et moins pertinents » en raison d’un sous-investissement chronique.

Cette vulnérabilité a conduit à une vente forcée de dettes en 2025, sous la pression des coûts opérationnels en hausse et d’une consommation des ménages atone depuis le rachat par Blackstone.

Legoland sous le feu des critiques : un empire en déclin
Les parcs Legoland, fleurons de Merlin avec leurs mondes en briques colorées, ne sont pas épargnés par cette crise. Leur chiffre d’affaires a reculé de 4,9 % à 1,025 milliard d’euros en 2024, plombé par une demande molle aux états-unis, des perturbations météorologiques et des performances en deçà des attentes.

Les pertes sont cinglantes : 171 millions d’euros au total pour les parcs Legoland, dont 130 millions pour le Legoland New York (ouvert récemment) et 41 millions pour Legoland Korea, en raison d’une maturité plus lente que prévue et de défis de marché persistants. Ces sites, censés booster la croissance internationale, peinent à rentabiliser les investissements initiaux, avec des taux d’occupation inférieurs aux projections.

Au-delà des chiffres, les conséquences opérationnelles se font sentir
Des mesures d’austérité budgétaire ont été mises en place dès l’hiver 2024-2025, affectant les opérations globales du groupe, y compris les maintenances et les nouveautés dans les parcs. Des voix critiques, comme celles sur les forums spécialisés, pointent un « sous-investissement » qui rend les attractions « moins attractives », risquant d’éroder la fidélité des familles et des touristes.
Malgré des lueurs d’espoir – croissance en Europe et au Japon, et l’ouverture imminente de Legoland Shanghai –, l’avenir semble incertain si les coûts énergétiques et salariaux continuent de grignoter les marges.

Madame Tussauds : la star de cire qui s’effrite
Pire encore pour Madame Tussauds, l’icône londonienne des célébrités en cire, qui subit les plus lourdes pertes : 192 millions d’euros sur la valeur de la marque, liée à des difficultés commerciales au Royaume-Uni et en Chine.
Cette dépréciation, partie des 225 millions sur les intangibles, reflète une chute de fréquentation dans un contexte de reprise économique inégale et de concurrence accrue des expériences numériques. des articles alarmants titraient même sur un « meltdown » à Madame Tussauds, soulignant comment le groupe a dû « trancher » dans les valorisations de ses sites phares.

Les impacts sont concrets
Provisions pour litiges légaux et paiements réglementaires (99 millions d’euros au total), et des modifications de baux pour sécuriser la tenure jusqu’en 2077, au prix de coûts futurs accrus. avec une volatilité de la qualité de crédit observée entre 2021 et 2025, Merlin risque de reporter des investissements dans les mises à jour des collections, rendant les musées moins « magiques » et plus vulnérables à la désaffection des visiteurs.

Les causes profondes : dette, inflation et consommation au ralenti
Au cœur de cette crise trône une dette colossale, vestige des rachats à effet de levier de 2019, amplifiée par des frais d’intérêt en hausse et une refinancement en février 2025 (émission de 484 millions de dollars d’obligations dues en 2032).
S’ajoutent des pressions inflationnistes sur les salaires (683 millions d’euros de coûts), l’énergie et le marketing, dans un secteur où la demande touristique reste freinée par l’incertitude économique. Le groupe, qui opère les quatre plus grands parcs britanniques, fait face à une concurrence féroce et à des risques comme les fluctuations des devises ou les incidents de sécurité potentiels.

Perspectives : une reprise possible, mais fragile
Pour 2025, Merlin adopte une posture prudente : des économies de 59 millions d’euros via un programme « smart spending », une restructuration régionale unifiée, et des nouveautés comme un Sea Life additionnel à Legoland Florida ou des expériences minecraft.
La liquidité est assurée jusqu’en Q3 2026, avec 140 millions d’euros de cash et 470 millions d’euros de lignes de crédit inutilisées. Pourtant, les scénarios pessimistes – comme une baisse de 5 % des cash flows – pourraient alourdir les pertes de 131 millions supplémentaires.

Les difficultés de Merlin Entertainments ne sont pas qu’un chiffre sur un bilan
Elles menacent l’essence même de la magie familiale que proposent Legoland et madame Tussauds. Sans investissements massifs et une reprise de la consommation, ces icônes risquent de perdre leur éclat. Reste à voir si Blackstone, en tant qu’actionnaire majoritaire, injectera les fonds nécessaires pour relancer la machine. Pour les fans, l’inquiétude est palpable : l’aventure lego et les stars de cire survivront-elles à cette tempête financière ?
*Sources : rapports annuels merlin, analyses s&p, et presse spécialisée. conversion gbp/eur au taux moyen 2024-2025 ≈ 1,18 € pour 1 £ (basé sur données historiques et actuelles).


