Celles et ceux qui s’intéressent à l’Orient savent que les Japonais considèrent qu’ils ont tous une même origine ethnique, quitte à discriminer toutes sortes de non-Japonais vivant sur leur territoire. Une forme de racisme qui s’est toujours manifesté en particulier envers les Chinois et les Coréens -les personnes issues des anciennes colonies-, ainsi que sur des « Nikkei », les japonais émigrés à l’étranger et leurs descendants.
Chez JAL, les bas salaires l’emporteraient face à l’orgueil national?
Au vu de ce fait culturel, on pourrait donc croire que la compagnie aérienne nationale nippone ait à cœur de recruter son personnel de bord uniquement au Japon. Ce n’est plus le cas, car Japan Airlines -comme les compagnies aériennes du Golfe- recrute désormais le personnel de cabine sur un autre marché asiatique.

Japan Airlines ne va pas très loin pour recruter
JAL, via son agence de recrutement officielle aux Philippines, TDG Human Resource Management, recrute du personnel de cabine sur place.
Dans le secteur des services, on trouve les Philippins partout dans le monde, du fait qu’ils parlent anglais couramment et de leur sens inné de l’accueil. Les croisiéristes le savent bien, car on les retrouve sur toutes les compagnies européennes et nord-américaines et à presque tous les postes à bord; des officiers aux cuisiniers, des serveurs aux ingénieurs. Pour info, ils représentent le quart des équipages de la marine marchande du globe.

Les Philippins expatriés sont très nombreux
Plus de 10 millions de Philippins (environ 10 % de la population de l’archipel) sont aujourd’hui exilés pour échapper au chômage et aux bas salaires dans leur pays d’origine. Cette population d’expatriés envoie plus de 30 milliards d’euros par an au pays, soit un dixième du produit intérieur brut des Philippines.

Et les Japonais? Leur histoire nationale expliquerait en partie la xénophobie
En 1639, le Japon avait adopté une politique connue sous le nom de sakoku (pays fermé), par laquelle la nation asiatique a fermé ses portes au reste du monde, interdisant à la fois l’entrée et la sortie des personnes. Quiconque entrerait ou quitterait le pays serait condamné à mort.

Cet isolement dura plus de deux cents ans et ce n’est qu’avec l’arrivée de l’empereur Meiji que le Japon autorise l’émigration. Non seulement il l’a permis, mais il l’a encouragé, mettant fin au système féodal et commença à transformer le pays d’une économie agraire en une économie industrielle et capitaliste. Le processus de modernisation mené au cours de l’ère Meiji, entre 1868 et 1912, allait finalement faire du Japon l’une des puissances mondiales.
Mais les réformes, inspirées par l’Occident, furent si vertigineuses qu’elles provoquèrent une transformation sociale rapide, attirant des milliers de personnes des zones rurales vers les villes. Les grands centres urbains, comme Tokyo et Osaka, commencèrent à avoir des problèmes de surpopulation.

C’est dans ce contexte que débuta la première grande vague migratoire japonaise. Les émigrants, qui seront plus tard connus sous le nom de « Nikkei » (une personne « ayant des liens » avec le Japon), quittent leur pays à la recherche de meilleures opportunités, encouragés par un gouvernement qui cherchait non seulement à résoudre le problème de la surpopulation, mais aussi à étendre son influence politique et l’économie du Japon dans le monde.

Au XXe siècle, les Japonais ont aussi connu une forte émigration
Installés d’abord à Hawaï, ces premiers émigrants ont ensuite déménagé aux États-Unis, s’installant sur la côte ouest. La vague d’immigration japonaise fut si grande qu’au début du XXe siècle, le gouvernement étasunien décida d’intervenir en interdisant l’arrivée de nouveaux arrivants en provenance du Japon.
C’est cette limitation qui a conduit de nombreux Japonais et le gouvernement de ce pays à s’intéresser à une nouvelle destination d’émigration: l’Amérique latine. Sur les quelque 245 000 Japonais ayant émigré dans les années 1940, les trois quarts, soit 189 000 personnes, se sont rendus au Brésil, 33 000 Japonais sont arrivés au Pérou, 15 000 au Mexique et 5 000 en Argentine (principalement en provenance du Brésil et du Pérou).

Beaucoup avaient l’intention de collecter des fonds et de retourner au Japon, mais la défaite de la guerre a mis fin à cet objectif. La migration massive des Japonais prend fin dans les années 1970, parce que l’économie est déjà développée et les absorbe.
La puissance économique du Japon moderne a inversé le phénomène migratoire au cours des dernières décennies, conduisant certains nisei (enfants des Nikkei) ou sansei (petits-enfants des Nikkei) à s’installer au Japon.
Aujourd’hui la plus grande communauté japonaise à l’étranger se trouve au Brésil. Entre-temps, les Brésiliens sont devenus la troisième plus grande minorité au Japon, après les Coréens et les Chinois.

Le Japon actuel, victime de son succès et du surtourisme
Poussée par la dévaluation du yen -qui a atteint cette année son plus bas historique par rapport à l’euro et au dollar- la mode du voyage au Japon doit faire face au fléau du surtourisme, avec de plus en plus de visiteurs qui arrivent sans aucune connaissance préalable de la culture locale.

Moins de temples et plus de shopping, moins de sushis et plus de fast-food. Fini le temps des cerisiers en fleur; les nouveaux voyageurs débarquent moins préparés culturellement et le pays en souffre. En conséquence, le manque d’éducation, la promiscuité dans les transports publics et la surpopulation dans les quartiers touristiques posent les plus grands défis aux Japonais, éduqués pour éviter la confrontation.

Une étude récente publiée par le journal Japan Times indique que le pays asiatique a accueilli 25 millions de voyageurs internationaux en 2023, soit une proportion de 0,2 touriste par habitant, considérée comme faible par rapport à la France et à l’Espagne, qui reçoivent respectivement 1,5 et 1 8 touriste par habitant. Et pourtant, cela exaspère les locaux.

Face à ce succès, les Japonais doivent se résigner à l’acceptation progressive de l’immigration étrangère, et non seulement chez le personnel de cabine, puisque de nombreux hôtels et entreprises à Kyoto et dans d’autres villes touristiques dépendent désormais du personnel philippin ou vietnamien pour leurs services de restauration et de nettoyage.