La République Tchèque, souvent surnommée la « perle de l’Europe centrale », attire chaque année des millions de touristes grâce à ses paysages variés et ses stations balnéaires idylliques. Des lacs scintillants de Bohême aux rivières sinueuses de Moravie, en passant par les célèbres stations thermales comme Karlovy Vary ou Mariánské Lázně, ces destinations offrent détente et bien-être. Pourtant, depuis le début de l’année 2025, une ombre plane sur ces havres de paix : une épidémie d’hépatite A qui frappe durement le pays, avec plus de 2 375 cas confirmés et 28 décès enregistrés à ce jour. Bien que l’épidémie soit nationale, elle touche particulièrement les zones touristiques, y compris les stations balnéaires et thermales, où l’eau et les interactions sociales favorisent la propagation du virus.

Une crise sanitaire inédite
L’hépatite A, une infection virale aiguë du foie transmise principalement par voie fécale-orale via de l’eau ou des aliments contaminés, connaît une recrudescence alarmante en Europe centrale. En République Tchèque, le nombre de cas a explosé : de 636 infections en 2024 à plus de 2 000 rien qu’en 2025, selon le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC). Les régions les plus affectées incluent Prague, la Bohême centrale et la Moravie-Silésie, mais l’épidémie s’étend désormais aux zones balnéaires. Par exemple, la région de Karlovy Vary, célèbre pour ses sources thermales et ses lacs, figure parmi les épicentres.

Certains groupes sont plus vulnérables que d’autres
Les groupes vulnérables : enfants de 1 à 9 ans, adultes de 25 à 44 ans, personnes sans abri, usagers de drogues et certaines communautés roms – représentent la majorité des cas. Six décès ont été rapportés dès mai 2025, et l‘ECDC alerte sur un risque de transmission transfrontalière vers la Slovaquie, la Hongrie et l’Autriche, où plus de 2 000 cas supplémentaires ont été recensés dans la même période. Dans les stations balnéaires comme celles autour du lac de Lipno ou les rives de la Vltava, la fréquentation estivale amplifie les dangers, avec des touristes exposés à des eaux potentiellement polluées par des rejets domestiques ou agricoles.

Eau et Tourisme, un cocktail risqué
Les stations balnéaires tchèques, telles que Poděbrady ou les complexes thermaux de Bohême du Sud, sont des joyaux naturels. Mais l’hépatite A prospère dans ces environnements : baignades dans des lacs ou rivières mal surveillés, consommation d’eau non traitée des sources thermales, ou repas dans des restaurants bondés favorisent la contamination.
Aujourd’hui, la pollution des eaux superficielles – due à l’agriculture intensive, aux effluents urbains et au changement climatique – exacerbe le risque
Seules 40 % des eaux européennes (lacs et rivières) sont en « bon état écologique »…
…selon l’Agence européenne pour l’environnement, et la République Tchèque n’échappe pas à cette tendance. Dans les stations comme Bečhyne, nichée dans la vallée de la Luznice, ou les thermes de Františkovy Lázně, les touristes ingèrent parfois de l’eau minérale brute, ignorant que des souches virales identiques circulent dans les réseaux interconnectés. L’ECDC identifie deux sous-génotypes d’hépatite A responsables, se propageant via des réseaux sociaux et géographiques connectés, y compris touristiques. Même les stations de ski comme Boží Dar, qui attirent en hiver, signalent désormais des cas, alertant sur une propagation hivernale via les surfaces contaminées.
Hygiène, pollution et vulnérabilités sociales
Au-delà de l’eau, l’épidémie révèle des failles structurelles. La transmission se fait principalement par contact personne-personne dans des contextes de faible hygiène : mains sales, surfaces partagées dans les hébergements touristiques, ou aliments manipulés par des porteurs asymptomatiques (jusqu’à 90 % des cas). Les stations balnéaires, avec leur afflux saisonnier, deviennent des foyers amplifiés. La pollution diffuse – pesticides agricoles et rejets d’eaux usées – contamine les sources, tandis que le réchauffement climatique réduit les débits fluviaux, concentrant les polluants.
Les touristes ne sont pas épargnés :
le Royaume-Uni a émis des avertissements pour la République Tchèque, recommandant la vaccination avant tout voyage. L’OMS et le ministère tchèque de la Santé soulignent que, malgré des progrès en assainissement, les infrastructures touristiques peinent à suivre la pression démographique.
Mobilisation
Face à la crise, les autorités tchèques mobilisent : campagnes de vaccination gratuite pour les groupes à risque, renforcement du nettoyage dans les transports pragois et les sites touristiques, et coordination européenne via l’ECDC. À Boží Dar, la station de ski a lancé des alertes sur les réseaux sociaux, promouvant le lavage des mains et l’usage de gel hydroalcoolique. Pour les stations balnéaires, des contrôles accrus sur la qualité de l’eau des lacs et rivières sont en cours, avec des fermetures temporaires si nécessaire.
Les voyageurs sont invités à suivre le mantra de l’OMS :
« Faire bouillir, cuire, peler ou oublier » pour les aliments et l’eau. La vaccination, efficace à 95 % après deux doses, est cruciale, surtout pour les séjours prolongés. Le gouvernement tchèque envisage même un remboursement par l’assurance maladie pour les adultes, une première.


