Budapest franchit un cap radical contre les locations de vacances. À partir du 1er janvier 2026, le 6e arrondissement, cœur culturel de la capitale hongroise avec l’avenue Andrássy, l’Opéra d’État et ses musées, interdira purement et simplement les locations courtes durées comme celles d’Airbnb.

Cette mesure, première du genre en Hongrie, répond à un référendum en ligne de 2024 où 54 % des votants se sont prononcés pour, malgré une faible participation de 20,5 %. Validée par la Cour suprême hongroise le 11 novembre 2025, elle s’inscrit dans une vague européenne de restrictions face au surtourisme et à la crise du logement.

Une explosion des locations qui asphyxie le quartier
Le 6e arrondissement concentre 8 % de son parc immobilier en Airbnb, contribuant à une hausse des loyers de plus de 10 % en 2024. Entre 2020 et 2024, ces locations de courtes durées ont bondi de 80 % à Budapest, dépassant le nombre de chambres d’hôtel – une particularité européenne – et représentant 40 % des nuitées touristiques, contre 28 % en moyenne sur le continent.
Résultat : nuisances quotidiennes pour les résidents, entre bruit, déchets, drogue et enterrements de vie de garçon. “Si on continue ainsi, tous les centres-villes ressembleront à un Disneyland” alerte Tamas Soproni, maire du district issu du parti libéral-gauche Momentum.

Le gouvernement hongrois a pavé la voie en quadruplant les taxes sur ces locations en 2024…
… et en imposant un moratoire de deux ans sur les nouvelles inscriptions, libérant les arrondissements pour des interdictions locales. Le 6e, qui tire 1 milliard de forints (environ 2,5 millions d’euros) par an de ces activités, estime la perte à 300 millions de forints, jugée gérable pour favoriser l’accès au logement aux classes moyennes.

Réactions mitigées : entre soutien populaire et craintes économiques
Les locaux saluent majoritairement cet exercice démocratique. Mais les propriétaires touchés comme certains retraités et investisseurs craignent un marché noir, tandis que des défenseurs d’Airbnb dénoncent une “ mesure anti-marché, un retour au communisme”. Ils plaident pour une régulation stricte, inspirée de Barcelone (hotline 24/7, détecteurs de bruit), plutôt qu’un bannissement total, arguant que cela nuira aux cafés et restaurants dépendants des touristes.

Un mouvement paneuropéen contre les locations touristiques
Budapest n’est pas seule. En Europe, les grandes villes serrent la vis : Barcelone prévoit une interdiction totale d’ici novembre 2028, après des restrictions partielles ; Berlin limite à 90 jours par an ; Amsterdam et Lisbonne exigent des licences ; tandis que Paris et Venise taxent lourdement.
À New York, un bannissement quasi-complet en 2023 n’a pas freiné les loyers ni les prix immobiliers, mais a boosté le marché noir et les hôtels. Ces mesures visent à contrer l’inflation locative – jusqu’à 20 % dans les zones touristiques – et à préserver la vie locale face à un tourisme de masse qui a fait bondir les nuitées de 15 % en Europe en 2024.
En Hongrie, d’autres arrondissements de Budapest pourraient emboîter le pas, bien que les sondages montrent peu d’appétit pour une interdiction municipale. Cette première à Budapest pourrait inspirer une régulation nationale plus musclée.
Vers un tourisme plus équilibré ?
Cette interdiction marque un tournant : prioriser les résidents sur les touristes de passage. Si elle soulage le 6e arrondissement, elle pose la question de l’équilibre économique. À suivre, pour voir si ce modèle freine vraiment la « Disneyfication » des villes européennes.


