23 avril, 2024
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Inspiration d’Algarve

Je me revois petit écolier français tirer la langue laborieusement en dessinant le littoral breton et pense que les petits écoliers portugais ont bien de la chance avec leur pays qui s’inscrit presque parfaitement dans un simple triangle rectangle. Une côte tirée au cordeau, la ligne de démarcation entre terre et océan quotidiennement effacée et retracée par le rude coup d’éponge des marées.

Mais en Algarve dès que la mer à grands bouillonnements d’écume a réglé sa vieille querelle avec le Cap Saint Vincent d’où rayonnèrent, jadis, les caravelles qui ont triomphé de ses lointains mystères, la vague s’apaise, se fait caressante, vient ronronner au creux des criques ou aligner ses coquillages sur le sable fin des longues grèves. La rive s’incurve paresseuse, en accolade, la pointe orientée plein sud, étirant comme deux ailes de mouette la côte Sotavento à l’est et de Barlavento à l’ouest.

Dès l’année nouvelle l’Algarve s’éveille sous la neige, celle de milliers d’amandiers plantés jadis par un riche vizir dont l’épouse, une belle princesse venue du nord dans la barque des vikings était restée sa captive plus par la loi de l’amour que par celle de la guerre. Comme elle regrettait les blancs hivers de son pays natal Son mari fit couvrir son domaine de ces arbres aux fleurs dont les pétales tombent en flocons vanillés au moindre souffle du vent.

Une légende assure que les Dieux « venaient en Algarve se reposer des longs travaux des jours ».Les mortels ont plus encore besoin de goûter toutes les joies de leur vie éphémère.

L’Algarve les offre toutes. Le soleil ruisselle d’un ciel limpide mais l’air y est vif, les pinèdes sont pleines d’ombres et d’odeurs. La mer est toujours accueillante aux pêcheurs, aux plongeurs, aux promeneurs, à ceux qui ne font que flâner sur le sable, baignés dans son haleine. Et mille promenades s’ouvrent sous les sabots des beaux chevaux portugais qui semblent tous dessinés par Vélasquez ( lequel comme on le sait était portugais par sa mère ).

L’Algarve a toujours attiré les peintres, pour ses teintes pures ses ombres denses, ses arêtes d’une netteté d’épure quand le soleil cisèle et sculpte les reliefs et les courbes de ses frontons festonnés.
On voit encore l’homme à chemise très blanche, un mouchoir sur la tête qui guide sa mule à pompons de laine…
…Et il y a toujours sous son vieux feutre noir une vieille femme qui, tresse de sparte aux doigts, se détache en ombre chinoise sur le mur laiteux.

L’Algarve odorant et secret comme un sérail a su garder son odeur pelucheuse de feuille de figuier, sa lumière à la fois ingénue et secrète. Il semble que les urbanistes d’aujourd’hui ont plus de travail que les écoliers d’hier pour en dessiner les contours.

Notes en marge sur mon carnet de voyages
Jacques BASCHIERI dit Vinicius

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