Les compagnies aériennes low-cost, championnes des petits prix, sont-elles devenues un peu trop gourmandes avec leurs frais de bagages à main ? C’est ce que pensent une quinzaine d’associations européennes de consommateurs, dont UFC-Que Choisir et CLCV en France, qui ont saisi la Commission européenne le 21 mai 2025 pour dénoncer les pratiques de sept compagnies: easyJet, Ryanair, Norwegian, Transavia, Volotea, Vueling et Wizz Air.

Voici un tour d’horizon de ce bras de fer entre voyageurs et compagnies aériennes, où les valises cabine deviennent un enjeu à plusieurs millions d’euros.
Des frais de bagages qui passent mal
Acheter un billet à 20 € pour Barcelone, c’est tentant… jusqu’à ce qu’on vous facture 43 € pour votre sac à dos chez EasyJet ou 36 € chez Ryanair pour un bagage cabine considéré comme “de grande taille”. Dans le pire des cas, Vueling peut même vous réclamer jusqu’à 280 € si votre valise dépasse les dimensions autorisées.

Selon les associations, ces frais sont non seulement exorbitants, mais aussi illégaux, car contraires à une décision de la Cour de justice de l’UE de 2014. Cette dernière stipule qu’un bagage à main de taille raisonnable ne peut être soumis à un supplément, à condition qu’il respecte les normes de sécurité.

Des règles floues et hétérogènes
Le casse-tête ne s’arrête pas là. Les dimensions des bagages autorisés varient d’une compagnie à l’autre, transformant la préparation d’un voyage en véritable jeu de Tetris. Un sac accepté gratuitement chez Ryanair peut être considéré comme “trop grand” chez Vueling, et vice versa. Cette incohérence complique la vie des voyageurs, qui doivent jongler avec des règles différentes à chaque vol. Les associations dénoncent cette opacité, qui pousse souvent les passagers à payer des frais imprévus à l’aéroport.

Une pratique jugée illégale
En 2014, la Cour de justice de l’UE a tranché : un bagage à main est un élément “nécessaire” au transport des passagers et ne peut être facturé, tant qu’il respecte des dimensions et un poids raisonnables. Pourtant, les sept compagnies visées continuent d’imposer des suppléments pour des valises cabine, même celles conformes aux normes de sécurité. Ce n’est pas la première fois que cette pratique est pointée du doigt : fin 2024, l’Espagne a infligé une amende record de 179 millions d’euros à Ryanair, EasyJet, Vueling, Volotea et Norwegian pour des pratiques similaires, notamment la facturation abusive des bagages à main.

Une stratégie lucrative, mais controversée
Pourquoi ces compagnies persistent-elles ? Parce que les bagages cabine sont une poule aux œufs d’or. Selon certaines estimations, les suppléments pour bagages rapportent des milliards d’euros chaque année aux compagnies low-cost. Ryanair, par exemple, a transformé les frais annexes en une véritable machine à cash, au point que le PDG Michael O’Leary a qualifié les critiques de “communistes fous” lors des sanctions espagnoles. Mais cette stratégie pourrait bientôt se heurter à une réglementation plus stricte.

Les compagnies se défendent… ou pas
Interrogées, Transavia et Volotea se sont retranchées derrière la position d’Airlines for Europe (A4E), qui regroupe 17 compagnies européennes, dont Ryanair et EasyJet. Selon A4E, interdire la facturation des bagages cabine réduirait le choix des consommateurs et les obligerait à payer pour des services dont ils n’ont pas besoin. Ryanair, fidèle à son style provocateur, affirme que ses tarifs respectent pleinement la réglementation européenne. Norwegian va plus loin, assurant que ses clients “apprécient” ce modèle tarifaire. EasyJet, Vueling et Wizz Air, eux, préfèrent pour l’instant garder le silence.

Un débat européen en cours
Cette action des associations intervient à un moment clé : l’UE discute actuellement d’une réforme du règlement sur les droits des passagers aériens. Pour UFC-Que Choisir, c’est l’occasion rêvée de clarifier ce qui doit être inclus dans le prix de base d’un billet, notamment un bagage à main de taille raisonnable. Une harmonisation des règles sur les dimensions et le poids des bagages pourrait également mettre fin au flou actuel et faciliter la vie des voyageurs.

Les voyageurs au cœur du combat
Les associations, menées par UFC-Que Choisir et CLCV, ne se contentent pas de dénoncer. Elles ont saisi la Commission européenne et la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) pour demander une enquête à l’échelle européenne. Leur objectif ? Sanctionner ces pratiques et forcer les compagnies à respecter la législation. Cette initiative fait écho à des plaintes récurrentes, comme celle d’une passagère facturée 60 € par Ryanair pour une simple gourde considérée comme un “second bagage”.

Un modèle low-cost en question
Le modèle low-cost, basé sur des billets à bas prix compensés par des frais annexes, est-il en train de montrer ses limites ? Si les compagnies doivent inclure un bagage cabine dans le prix du billet, cela pourrait augmenter les tarifs de base, au grand dam des voyageurs adeptes des vols à 10 €. Mais pour beaucoup, ce serait un juste retour à une transparence tarifaire, loin des surprises désagréables à l’embarquement.

Conclusion: une valise pleine d’espoir
La bataille contre la facturation des bagages à main est loin d’être terminée, mais les associations de consommateurs ont dégainé une arme de poids : le droit européen. En attendant une éventuelle enquête de la Commission européenne, les voyageurs sont invités à vérifier les politiques de bagages des compagnies avant de réserver et à signaler toute pratique abusive à la DGCCRF. Une chose est sûre : la prochaine fois que vous préparerez votre valise cabine, vous regarderez ses dimensions avec un œil nouveau… et peut-être un mètre ruban à la main ! Pour plus d’informations, consultez les sites d’UFC-Que Choisir ou de la Commission européenne.