La taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA), surnommée « taxe Chirac », fait débat en France. Alourdie en 2025, elle impacte lourdement les compagnies aériennes, en particulier les low-cost, et menace la vitalité économique des aéroports régionaux. Alors que la ministre du Tourisme, Nathalie Delattre, se dit favorable à sa suppression, les critiques fusent sur ses effets néfastes pour les voyageurs modestes et les régions.
Un triplement des coûts
Adoptée dans la loi de finances 2025, la TSBA est passée de 2,63 € à 7,40 € pour les vols intérieurs et européens en classe économique, effective depuis le 1er mars 2025. Pour les vols long-courriers, elle atteint 40 €, et jusqu’à 2 100 € pour les jets d’affaires. Cette hausse, visant à générer 800 millions d’euros de recettes supplémentaires, finance principalement l’Agence de Financement des Infrastructures de Transport de France (AFITF), mais détourne 210 millions d’euros du Fonds de solidarité pour le développement. Les compagnies, comme Air France-KLM, qui paie déjà 140 millions d’euros annuels, dénoncent une charge fiscale écrasante.
Une répercussion sur les prix
Cette augmentation est répercutée sur les billets, augmentant les coûts pour les voyageurs. Sur un vol low-cost Paris-Athènes (57 €), la taxe représente désormais 13 % du prix, contre 4,6 % auparavant. Pour les compagnies low-cost comme Ryanair et EasyJet, dont les marges sont minces (6-7 € par billet), cette hausse menace la viabilité de certaines lignes.
Impact sur les compagnies low-cost
Les low-cost, représentant 70 % du trafic dans 18 aéroports français, comme Beauvais, Carcassonne ou Bergerac, sont particulièrement vulnérables. Ryanair a déjà supprimé ses liaisons depuis Vatry (Marne) vers Porto et Marrakech, et annonce la fin de ses activités à Strasbourg, Bergerac et Brive pour l’hiver 2025. EasyJet envisage également de réduire ses dessertes. Ces décisions sont motivées par la hausse des coûts, qui rend certains trajets non rentables. « Cette taxe est un repoussoir », déplore Thomas Juin, président de l’Union des Aéroports Français (UAF).
Une perte de compétitivité
Les compagnies low-cost menacent de se redéployer vers des aéroports voisins, comme Gérone (Espagne), où les taxes sont moindres. En 2024, le trafic aérien français était inférieur de 4 % à 2019, contre une hausse de 17 % en Espagne. Cette fuite vers des hubs étrangers fragilise l’attractivité touristique et économique de la France, où le secteur aérien soutient 567 000 emplois et 1,8 % du PIB.
Conséquences pour les aéroports régionaux
Les aéroports régionaux, comme Beauvais (80 % de trafic low-cost) ou Perpignan, dépendent fortement de ces compagnies pour leur rentabilité. Leur départ entraîne une baisse du trafic, menaçant des emplois directs (personnel aéroportuaire) et indirects (tourisme, hôtellerie). À Vatry, la suppression des lignes Ryanair est un « coup de massue », selon le directeur Fabrice Pauquet. Les régions, qui financent ces aéroports via les impôts locaux, risquent de perdre des millions d’euros.
Un risque d’isolement
La ministre Nathalie Delattre critique l’opportunisme de Ryanair, qui « profite » de la taxe pour réduire ses activités, mais reconnaît que son impact sur les low-cost est significatif. Les élus locaux, comme Christophe Manas en Occitanie, s’inquiètent d’un « isolement » des territoires. Sans alternatives, ces aéroports pourraient devenir des « guichets abandonnés », réduisant l’accessibilité pour les habitants.
Une taxe controversée
Nathalie Delattre et le ministre des Transports, Philippe Tabarot, plaident pour une « pause fiscale » en 2026, arguant que la taxe « ralentit le trafic aérien ». L’UAF qualifie la mesure d’« économiquement irresponsable », estimant qu’elle favorise les hubs étrangers au détriment des régions françaises. Les voyageurs modestes, principaux clients des low-cost, subissent une hausse des prix, rendant les voyages moins accessibles.
Un objectif écologique en question
Présentée comme une mesure de « justice fiscale et écologique », la TSBA vise à limiter les émissions de l’aviation (3 % des gaz à effet de serre). Cependant, son effet dissuasif est faible, selon la Convention citoyenne pour le climat. Les compagnies dénoncent un détournement des fonds vers la SNCF, au lieu de financer la décarbonation aérienne.