Bleu indigo sur les murs, fibres de mûrier entre les doigts, céramiques aux nuances minérales, parfums de fermentation douce… Dans la région japonaise de Setouchi, on voyage avec les sens.
De la Kojima Jeans Street, temple du denim japonais, aux ateliers de papier washi d’Uchiko, en passant par les maisons marchandes créatives de Wakimachi, la région dévoile un Japon authentique pour les voyageurs en quête de rencontres, de savoir-faire et d’authenticité simple.
Le washi, un papier traditionnel japonais au cœur d’un savoir-faire ancestral
La petite ville d’Uchiko, sur l’île de Shikoku, est célèbre pour la fabrication du papier washi Ozu, incarnant l’essence même de la tradition artisanale japonaise et de l’art du papier. Ce savoir-faire, transmis de génération en génération, fait du washi Ozu un héritage précieux, reconnu pour la qualité remarquable de son grain et la finesse exceptionnelle de ses fibres.
Les calligraphes en apprécient d’ailleurs la texture fibrée, la douceur et la résistance. Bien plus qu’un simple matériau, ce papier incarne une tradition ancienne dont la texture exquise et la grande durabilité lui ont valu une renommée internationale.
L’atelier Tenjin Sanshi est l’un des derniers lieux de fabrication d’un washi artisanal qui n’utilise pas de machines. Outre le papier de calligraphie et d’emballage, le washi Ozu de l’atelier Tenjin Sanshi sert à la fabrication de cerfs-volants, célébrés depuis quatre siècles lors d’une grande compétition annuelle en mai.
Il est également utilisé comme élément décoratif pour les shōji, les parois coulissantes traditionnelles japonaises. Les visiteurs de l’atelier ont l’opportunité d’observer le processus de fabrication du washi et peuvent aussi participer à un atelier de création.
Des blocs-notes et d’autres articles artisanaux en washi sont proposés à la vente au musée Ozu Washi situé sur place.
Horaires du musée Ōzu Washi Kaikan : ouvert tous les jours de 8h30 à 17h (y compris le samedi, le dimanche et les jours fériés).
Visite de l’atelier (du lundi au vendredi de 9h00 à 16h00) : Adultes : 550 yens (3,10 €), Enfants (primaire, collège, lycée) : 220 yens (1,25 €)
Atelier de fabrication du papier washi
(inclut la visite de l’atelier – du lundi au vendredi de 9h00 à 16h00) : Adultes : 1 650 yens (9,30 €), Enfants (primaire, collège, lycée) : 1 100 yens (6,20 €)
*Selon le taux de change en novembre 2025.
Kojima : la cité indigo, berceau du denim japonais
Sur la côte de Kurashiki (Okayama), Kojima cultive une histoire singulière : ici, le denim n’est pas un produit, c’est une identité. Privée autrefois de culture du riz à cause de son sol salin, la région s’est tournée vers le coton, avant de devenir le berceau du bleu denim japonais, cet indigo profond reconnaissable au premier regard.
Aujourd’hui encore, artisans, teinturiers et designers y perpétuent un savoir-faire précis, presque chorégraphique, où chaque geste compte.
Le cœur battant de cette culture se découvre le long de Kojima Jeans Street, une rue entière dédiée au denim. Devantures boisées, fanions indigo, ateliers ouverts et boutiques pointues s’y enchaînent.
On s’y laisse happer par les pièces de Momotaro, marque culte dont les jeans, coupés à la main et tissés sur métiers anciens, sont devenus une référence absolue du “Made in Japan”. Ici, le denim vieillit, se patine.
Non loin, KOJIMA GENES perpétue une fabrication artisanale qui privilégie la matière brute, le design et la durabilité, à un prix accessible. Et pour vivre cette culture de l’intérieur, on peut dormir au DENIM HOSTEL float, un hébergement-concept posé au bord de l’eau, où chaque détail rappelle l’âme textile du lieu.
Wakimachi Udatsu Street : un patrimoine marchand devenu scène créative
À Tokushima, Wakimachi Udatsu Street forme l’une des plus belles rues historiques du Japon, bordée de maisons marchandes de l’époque Edo, reconnaissables à leurs élégantes « udatsu » – ces hauts murs coupe-feu, autrefois symbole de prestige artisanal.
Longtemps menacée par l’oubli, les habitants ont choisi de faire de cette rue un lieu de création contemporaine : cafés culturels, ateliers de teinture à l’indigo, galeries, cafés et petites boutiques qui font vivre ce patrimoine avec une énergie contemporaine.
La promenade révèle ainsi une culture artisanale encore active, où transmission, économie locale et créativité se rencontrent.
La teinture Awa-ai, l’indigo vivant de Tokushima
Au cœur de la rue Udatsu, Udatsu Studio of Yamauchi perpétue l’un des savoir-faire les plus emblématiques de Tokushima : la teinture à l’indigo naturel Awa-ai, indigo traditionnel de la région, cultivé et fermenté selon des méthodes ancestrales.
Ici, la couleur ne se fabrique pas, elle se cultive. Les feuilles d’indigo sont récoltées, séchées, puis fermentées dans de grandes cuves d’argile avant d’être utilisées pour teindre tissus et objets du quotidien.
Les visiteurs peuvent assister à la préparation des bains, saisir les subtilités du processus – et même teindre eux-mêmes un foulard ou un mouchoir, observant le bleu profond naître puis évoluer au contact de l’air. Une expérience sensorielle, patiente et vivante, où l’on comprend la beauté du geste et l’importance du temps.
Atelier pratique de teinture à l’indigo — Udatsu Street, Wakimachi, Mima City (Préfecture de Tokushima)
45-1, Tsutsukudari-cho, Wakimachi, Mima City, Tokushima
Durée : 1 heure (groupe maximum 8 personnes)
Langue : japonais (le personnel montrera les étapes avec des gestes)
Horaires : 10 h à 16 h. Fermé : les mardis.
Le renouveau des matières : du soja aux céramiques
À Fukuoka Shoyu Gallery, le patrimoine culinaire se transforme aujourd’hui en un véritable espace d’art et de création. Nichée dans un bâtiment centenaire — autrefois brasserie de sauce soja dans une partie et comptoir de banque dans l’autre — cette ancienne fabrique raconte l’art délicat de la fermentation, fondé sur la patience, le climat et la transmission du geste.
Ici, le visiteur découvre ce qui fait la singularité du goût japonais : l’attention aux micro-variations, la relation intime avec l’environnement, le respect de cycles lents. Désormais le lieu accueille des expositions contemporaines, où le savoir-faire traditionnel trouve un nouvel écho dans la création artistique actuelle. Site web.
Tout près, au cœur du quartier historique d’Imbe — berceau de la poterie Bizen-yaki — de petits ateliers-boutiques invitent les visiteurs à découvrir l’un des savoir-faire les plus anciens du Japon.
Dans ces espaces chaleureux, les artisans façonnent bols, tasses et pièces utilitaires à la main, avant une cuisson dans des fours traditionnels alimentés au bois, qui révèle les teintes profondes et la texture brute de l’argile locale.
Chaque objet reflète la singularité de cette céramique sans glaçure : traces du feu, nuances naturelles, surfaces légèrement irrégulières. Ce sont des pièces uniques, marquées par le geste patient de l’artisan et la puissance de la matière.
Ces ateliers offrent non seulement la possibilité d’admirer et d’acquérir des pièces authentiques, mais aussi, pour certains, de participer à une initiation à la poterie — une expérience immersive qui permet de comprendre la beauté simple et vivante du Bizen-yaki.
Fukuoka Shoyu Gallery : Kita-ku, Okayama
25 minutes à pied depuis la gare JR Okayama Station (sortie Est). Ouverture de 10h à 17h du jeudi au dimanche. Fermé du lundi au mercredi sauf jours fériés et vacances scolaires.
Texte et visuels fournis par SETOUCHI C/O MONDELLO ENTERPRISE.