Titus n’aimait pas Bérénice
La narratrice abandonnée par un amant, qui n’a pas su renoncer à son bonheur familial, imagine pouvoir apaiser sa peine en relisant tout le théâtre de Racine et ses héroïnes malheureuses. Si elle arrive à comprendre comment un janséniste, courtisan, poète tragique, académicien, bourgeois ambitieux, voluptueux, chrétien disgracié a pu écrire des vers aussi poignants sur l’amour des femmes, des intrigues, où la réciprocité de l’amour est incompatible avec la nature humaine, alors elle comprendra pourquoi son Titus l’a quittée.
Le pari est risqué mais l’idée du roman est superbe en créant un parallélisme entre renonciation d’état et résignation domestique. La narratrice va investir la vie de Racine, qu’elle nomme familièrement Jean. Elle va imaginer ses sentiments, ses réflexions, ses souffrances amoureuses, les tourments que Port Royal lui a inoculés. Nathalie Azoulai dresse le portrait d’un Racine qui versifie, cisèle chaque vers avec précision, la précision ce don de Dieu.
Un Racine partagé entre religion, théâtre et faste de Versailles. Un Racine abandonné par La Duparc sa comédienne fétiche et sa maîtresse.
C’est un livre ambitieux, sur les amours dévastés alors qui mieux que Racine pour consoler du désamour ? Le temps certainement.
En chaque homme il y a un Titus lâche face à l’amour, et en chaque femme une Bérénice prête à affronter cette tragédie de l’amour.
« Vouloir comprendre ce qu’on appelle l’amour, c’est vouloir attraper le vent. »
Titus n’aimait pas Bérénice- Nathalie Azoulay. Folio. 288 pages. 7,70€
Chronique écrite par François Colonna