18 avril, 2024
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Une destination, une chanson : Clandestino de Manu Chao

Vers la fin 1998, le chanteur franco-espagnol Manu Chao lançait sa carrière solo après la séparation d’avec le groupe Mano Negra. La chanson Clandestino qui donnait le titre à l’album est devenue un hymne qu’on entendait avec insistance à Paris, Madrid ou même Tijuana. Le succès fut planétaire et, en 2019, il réédita le titre avec une reprise emblématique aux côtés de la chanteuse trinidadienne Calypso Rose. Le nouvel album reprenait le thème qui avait déjà inspiré le premier, la migration, toujours d’actualité tant en Europe qu’à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis.

Fils d’émigrants espagnols en France (père galicien et mère basque), Manu Chao est né à Paris en 1961, dans un environnement intellectuel, multiculturel et plurilingue, car son père était écrivain et journaliste et sa mère chercheuse au CNRS. Ce qui se traduit en partie dans les chansons du disque (chantées tantôt en castillan avec des expressions de l’espagnol parlé au Mexique, en français, en anglais et en portugais) une sorte de pont pour connecter deux réalités socioculturelles, l’européenne et la latino-américaine, le nord et le sud. Un voyage initiatique à travers les pays latins et l’Afrique, sur les routes de la France, l’Espagne et l’Italie, puis le Sénégal et le Mali, et enfin le Mexique, la Colombie, le Brésil et l’Argentine. Durant cette période nomade, avec son studio portable, il n’a cessé d’enregistrer les sons de la rue et le germe de quelques chansons métisses qui donneront du contenu à son premier solo.

Pour ce qui est de son actualité, en 2012 est parue la biographie en français de Véronique Mortaigne, Manu Chao, un nomade contemporain, suivie d’un autre titre en anglais (puis traduit en français) du journaliste britannique Peter Culshaw, Clandestino, à la recherche de Manu Chao qui reprend cinq années de tournée mondiale.

Enfin, en 2020 est sorti un livre en espagnol intitulé Manu Chao, ilegal qui retrace l’itinéraire du chanteur jusqu’à nos jours sous l’approche journalistique et littéraire des auteurs Kike Turrón et Kike Babas, qui le connaissent depuis le milieu des années 90 et avec qui il a également partagé ses aventures on the road. En pleine pandémie, et après une longue absence reniant la célébrité, Manu Chao choisit de se produire dans des bars, continue à soutenir les causes des minorités et offre des chansons sur internet depuis son appartement de Barcelone durant le confinement.

Manu Chao

Ce musicien aux mille combats, anticapitaliste, altermondialiste et proche de l’anarchisme reste toujours fidèle à lui-même et à ses slogans répétés au cours de ces années : “tout est un mensonge” et “nous vivons la dictature de l’économie”. Il n’a pas de maison de disques, ne fais pas de tournées mondiales comme d’autres artistes de sa catégorie, reçoit des offres pour jouer dans les meilleurs festivals du monde mais les refuse, ne donne pas d’entretiens, ni se sert d’un téléphone portable. Il fait des concerts dans les bars et les bistrots, qu’il considère comme les seuls espaces vraiment démocratiques où l’on cause et où l’on chante avec les gens su quartier pour tuer le temps. 

Il reste cependant à considérer ce type d’engagements antisystème à la lumière des événements qui ont marqué l’actualité depuis la sortie du premier Clandestino. Dès le début de sa carrière solo, Chao a soulevé pas mal de controverses en soutenant des mouvements violents tels que le zapatisme dans le Chiapas, le contre-sommet du G8 à Gênes où il a chanté en 2001 ou le rassemblement du Larzac en 2003. Et même si l’on éprouve toujours de la sympathie pour son côté libertaire, son effacement et son silence face à d’étranges phénomènes de haute tension comme les gilets jaunes et les No Vax ne sont pas moins appréciables. On préfère de loin le Manu insaisissable avec ses passions et ses contradictions, à un nouvel apôtre porte-drapeau des idéologies radicalisées.

C.A.T.

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