Décidément, les réseaux sociaux offrent tous les jours du poilant. Mère nourricière de la bêtise globalisée, Tiktok est une source inépuisable de « tendances » sous forme de « challenges », dont beaucoup concernent les voyages. Après le très profond raw dogging aérien que nous avons évoqué dans notre article du 19 août, voici comment influencer ses followers en photographiant ou (mieux) en filmant le contenu de son bac de sécurité à l’aéroport, à toute vitesse, et de la façon la plus esthétique possible.
Il ne s’agit pas de scanner corporel, rassurez-vous, surtout pas celui du cerveau. Mais de l’étape qui précède les rayons X qui scrutent nos bagages à main -oui, celle-là, la plus fastidieuse- celle où l’on nous demande de nous défaire de tout ce qui peut être compromettant pour la sécurité à bord, y compris l’ancienne ceinture en cuir décroûté de chez Célio à laquelle vous êtes tellement attaché(e).
Visiblement, les Gen Z et autres influenceurs/euses savent comment partager ce qu’ils/elles ont de plus cher et intime et faire contre mauvaise fortune bon cœur, en transformant un moment avilissant de dépouillement publique en œuvre d’art. Enfin, mauvaise fortune c’est vite dit, car dans l’univers tokeur la gratuité n’est pas monnaie courante, et la moyenne de rémunération est de 0,01 à 0,02 euros pour chaque vue sponsorisée. Grosso modo, si votre vidéo atteint 100.000 vues cela pourrait vous rapporter 1.000 euros. De quoi vous acheter une parure complète chez Célio, voire vous upgrader chez H&M.
Nature morte avec IPhone
Et puisque de toute manière on n’y échappera pas, pourquoi ne pas vivre cet instant avec fun en mettant minutieusement en scène l’intégralité de son bagage à main afin de prendre la plus belle photo possible? Utile, de surcroît, afin que le fier agent ganté derrière le sas nous trouve 100% soupçon free et nous livre de sa palpation.
Donnez donc libre cours à votre esprit créatif et lancez-vous vers des natures mortes aux couleurs coordonnées à partir de bijoux, de cosmétiques, de lunettes de soleil et de téléphones portables. Vous pouvez même y ajouter chaussures ou baskets et vivre à plein votre aventure de rangement aéroportuaire façon Marie Kondo.
Plan B, comme bac en plastique gris
Le seul hic est que plier et draper soigneusement vos objets personnels prend un temps fou, dont personne aux portiques de sécurité ne dispose réellement. Cependant, afin de ne pas accroître encore le mécontentement des autres voyageurs, les artistes des bacs gris ont développé deux stratégies.
Certains ne prennent les photos qu’après le damné portique et d’autres n’ont pas du tout besoin d’un aéroport, et font simplement les clichés chez eux à l’aide de Photoshop et d’un bac en plastique acheté, comprenant une carte d’embarquement faite maison. Du toc sur TikTok, quoi. Pas bien les enfants; ça perd ce côté « spontané » exigé par les followers qui vous suivent en live.
Car les meilleures photos et vidéos sont celles destinées à transmettre un certain style de vie et un certain sens du bon goût, combinant le frisson du voyage et la consommation ostentatoire. Vous n’y croyez pas? Selon le journal New York Post, plus de 16 millions d’images de la tendance « Airport Tray Aesthetic » avaient déjà été partagées fin août. Et toc.
Pourquoi pas un challenge burlesque à la Daniel Prévost?
Pour la prochaine, il m’est venu une idée gaillardement virale. Pour être suivi et gagner en notoriété, installez-vous dans l’une de ces villes françaises aux toponymes désopilants et partagez votre quotidien hyper marrant, en direct, avec votre communauté. Vous avez un profil plus international? Partez donc pour Concon, la capitale gastronomique du Chili. Là, vous aurez peut-être la chance de vous mettre plus facilement en avant dans le cas de collaborations commerciales…
C.A.T.
