Le choix de Jean-François Colonna cette semaine : Un très beau livre d’Albert Camus. Cette sélection va certainement faire très plaisir à un grand admirateur de Camus : notre ami Pierre Hawawini (Keepcall)
Noces suivi de L’été – Albert Camus.
Recueil d’essais lyriques, sur la contemplation du monde. Ode à la beauté, au soleil, à la mer et à sa terre natale, l’Algérie. Camus écrit Noces à vingt-trois ans, en 1936. Noces débute par deux déambulations. La première dans les ruines de Tipasa puis dans le vent de Djémila. « Heureux celui des vivants qui a vu ces choses-là». Nous aussi, le soleil nous aveugle, l’odeur des absinthes nous enivre. Voici les Noces de Camus avec la terre, le soleil et la mer. Il faut avoir s’abandonner et jouir du monde.
L’été débute par un hymne d’amour pour Alger où la mer est au tournant de chaque rue. Un pays sans leçon, qui a le visage des hommes les plus pauvres. Ici on se dépêche de vivre dans l’insouciance de l’avenir.
Camus est enfant d’Algérie, prendre conscience de son présent c’est ne plus rien attendre. Camus se moque de l’éternité et médite sur la mort, qui lui fait horreur, car il aime jalousement la vie. Camus philosophe ensuite sur la beauté. Nous nous sommes détournés de la beauté des Grecs. Nous avons aboli la pensée de la Grèce Antique qui s’est toujours retranchée sur l’idée de limite. Les Grecs savaient que les Dieux punissaient l’ubris, cette démesure des hommes. Notre époque a aboli les bornes dans sa volonté de conquête de l’absolu. L’époque veut ordonner le monde avant de l’avoir compris.
Terrible intuition, dès 1950 Camus nous met en garde : « nous marchons vers la théocratie, comme ceux que les grecs appelaient les barbares ».
Camus au discours écologique : les villes nous amputent de la nature, de la mer de ce qui fait notre permanence.
Dans une nouvelle bouleversante, Retour à Tipasa, Camus l’exilé s’en retourne en décembre 1952 à la recherche de l’ancienne beauté de sa jeunesse. Il ne faut jamais retourner sur les traces de son adolescence, la déception nous y guette. Mais là miracle, sous la lumière glorieuse de décembre, Camus apprends qu’il a en lui un été invincible. Il a retrouvé la lumière de son pays natal, mais il sait qu’il ne pourra renoncer aux servitudes de son temps. Il faut quitter Tipasa.
Fils de la terre d’Algérie, Camus qui se moquait de l’éternité, vivra un éternel exil.
« J’ai grandi dans la mer et la pauvreté, puis j’ai perdu la mer, tous les luxes alors m’ont paru gris, la misère intolérable. Depuis, j’attends. »
Noces suivi de L’été Albert Camus – Chez Folio – 183 pages 6,70€
Texte de Jean-François Colonna – Auteur de Reflets
Jean-François a l’art d’attirer l’attention sur la simplicité des choses aimées de Camus, l’étranger…dans son oeuvre complexe.
C’est encore une oeuvre de choix qui nous est conseillée.
Un grand merci à Serge Fabre et à Jean-François Colonna pour cette rubrique dédiée à Albert Camus et surtout son oeuvre magistrale dont fait partie NOCES suivis de l’Été.
Oui, Camus est un auteur, philosophe intemporel et immuable.
Nous sommes tous héritiers et inconsolables orphelins de Camus. de tous les Camus, des trois périodes ou cycles fondamentaux de son oeuvre magistrale, de l’absurde à celui de la révolte et enfin celui de l’amour….
Lisez tous Camus cela apaise et nous conforte dans l’idée de la fragilité « absurde » de notre condition humaine mais en même temps cela renforce notre capacité à nous « révolter », ne jamais renoncer nous battre et avancer, avec entre l’autre l’amitié la fidélité et » l’amour.. »
Belle leçon d’espoir par ces temps difficile pour nous tous.