24 avril, 2024
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Une destination, une chanson : Milano, sushi & coca de M¥SS KETA

Bien avant la pandémie et la vague de masques chirurgicaux, l’excentrique chanteuse Myss Keta (apocope de kétamine) fit son irruption dans la scène musicale milanaise en lunettes noires de rigueur, nez et bouche toujours cachés par un voile très glamour, pour incarner l’esprit mode et provocation de sa ville natale. En 2013, elle s’impose avec le titre Milano, sushi & coca au contenu explicite qui a fait tordre le nez aux bien-pensants (la « Milano per bene » en italien) tout en trouvant appui dans la culture underground. Au-delà du fait qu’elle est née et grandi dans le quartier Forlanini, on ne sait rien d’autre, ce qui augmente l’aura de mystère qui l’enveloppe.

https://youtu.be/4CTMzWCko1A

Le personnage ainsi créé trouve toujours le moyen de faire parler d’elle, malgré une musicalité assez élémentaire et des textes frivoles et souvent vulgaires qui dévoilent sans pudeur la Milan bling-bling de l’ère post-berlusconienne et ses chaînes de télé trash. La miss et sa bande -elle fait partie d’un collectif d’artistes féministes tout aussi loufoques aux noms de « Miuccia Panda » (jeu de mots sur Miuccia Prada, la propriétaire de la maison de mode homonyme) ou « la Iban » -, portent un regard désabusé sur les habitudes de la bourgeoisie de bon ton et du show-biz de cabotage. Il n’y a pas d’avenir, il n’y a pas de morale… en effet c’est précisément cette amoralité ostentatoire, réitérée en quelques concepts simples – empruntés à la droite de Forza Italia, le parti de Berlusconi : l’image de la famille modèle à l’extérieur, mais une bande de dépravés à huis-clos – qui sculptent le charme voyeuriste du « projet » Keta.

Dans leurs vidéos, ces créatures de nuit qui adorent s’amuser évoluent strictement à l’intérieur des murs de leur ville, d’afters dans des bars branchés en nuits interminables dans les nightclubs de la capitale lombarde. Si elles s’aventurent en dehors des quartiers tendance, c’est pour aller fêter le Nouvel-An à Courmayeur, la station de sports d’hiver chic du Val d’Aoste préférée des m’as-tu-vu milanais. Myss Keta et ses acolytes sont persuadées que les filles sages vont au paradis, tandis que les friponnes peuvent aller partout…pourquoi donc s’éloigner de Milan quand tout ce qui compte dans ce monde se trouve dans la puissante ville-état du nord ?

Le « concept marketing » artistique et médiatique incarné par Myss Keta égrène les références sur la ville la plus riche du pays en tant que points de repère d’une Italie contradictoire et décadente. D’autres titres comme Burqa di Gucci ou Le ragazze di Porta Venezia caricaturent à merveille les clichés de la célébrité, de l’argent de la corruption cachée derrière les marques de luxe. Sexe, drogue et pouvoir, succès, mode et excès, se répètent dans une boucle sans fin de rythmes syncopés et rétro-futuristes, avec la disco des années 80, le trap, le rap et la hard house en arrière-plan.

Quant aux paroles de Milano, sushi & coca, elles passent en revue les musts du circuit nocturne pre et post clubbing du début du XXIe siècle: un vodka-soda au concept-store 10, corso Como Café (près de Porta Garibaldi), ou un cosmopolitan à l’Armani Caffè (quartier du Quadrilatère de la mode) suivi d’un tempura, chirashi et nigiri chez Shiro Poporoya (quartier Buenos Aires, Porta Venezia), avant d’attaquer les dancefloors du Borgo (aujourd’hui fermé), du Vogue (disco mythique des années 80) ou du Plastic (quartier Vigentino, sud-est de la ville, un peu excentré) pour en finir dans un after près du Duomo. Comment tenir un tel marathon ? La réponse codée est dans La Bamba

C.A.T.

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