Une fois Akbar Al Baker parti, les langues se délient. On apprend que sa démission était dans l’air depuis plusieurs mois. Le président du conseil de surveillance de Qatar Airways, Saad Sherida al-Kaabi, également ministre de l’énergie et patron de la puissante compagnie pétrolière Qatar Energy, avait demandé depuis un certain temps que le DG de la compagnie aérienne mette en place une gouvernance d’entreprise moderne. Il s’agissait de mieux répartir les responsabilités. Cependant, Al Baker voulait conserver le contrôle total et sans concession. Sa démission devenait inévitable.
Al Baker n’était un homme ni de compromis et ni d’équilibre
En interne, l’homme de 62 ans était un autocrate inébranlable. En externe, il aimait aussi dénoncer ses partenaires commerciaux. Le personnel d’Airbus pourrait raconter des dizaines d’anecdotes peu agréables à ce sujet. Il a un jour refusé de prendre livraison de son premier avion long-courrier Airbus, l’A350, parce qu’il n’aimait pas la couleur d’un tapis dans une petite zone. Une soirée de gala déjà entièrement préparée pour des centaines d’invités à Toulouse a dû être annulée.
Mais tout le monde a dû endurer des disputes publiques avec lui à un moment donné
« Boeing a clairement échoué », avait déclaré Al Baker en 2010 en raison des retards sur les avions long-courriers 787. Une bonne dizaine d’années plus tard, il s’est disputé avec Airbus au sujet de défauts sur la surface du fuselage de plusieurs des A350. Il a refusé de prendre livraison des avions. Il s’est adressé au tribunal et a exigé plus d’un milliard de dollars de compensation. Airbus a alors annulé toutes les commandes en cours. Les histoires devenaient de plus en plus folles, et pour ceux qui n’étaient pas concernés, elles étaient extrêmement divertissantes.
Akbar Al Baker est parti de rien pour faire de Qatar Airways, une compagnie mondiale
En 1997, l’homme prend la tête d’une mini-compagnie aérienne dotée de quelques appareils qui ne joue aucun rôle au niveau international. Il a reçu le mandat de construire un méga hub similaire à celui d’Emirates. Malgré les critiques de concurrence déloyale des compagnies aériennes occidentales, il aura réussi le pari d’être un des principaux actionnaires (25%) d’IAG ( British Airways, Iberia, Aer Lingus and Iberia Express, LEVEL et Vueling). L’argent ne semblait pas jouer un rôle, la croissance semblait avoir encore plus d’importance, et la compagnie aérienne remportait donc récompense après récompense pour son bon produit en vol.
L’émir du Qatar est intervenu
Même au Qatar, les esclandres d’Al Baker n’étaient pas appréciés, malgré ses services indéniables rendus à la compagnie aérienne. En fin de compte, l’émir du Qatar aurait fait une annonce politique claire en faveur d’un changement au sein de Qatar Airways. L’émirat devrait lui trouver un autre point de chute.
L’ère Al Baker est terminée après 27 ans
Qatar Airways a annoncé dans un bref communiqué que Badr Mohammed al-Meer serait le nouveau PDG à partir du 5 novembre.
Le successeur d’Al Baker était auparavant directeur opérationnel de l’aéroport de Doha, un initié que presque personne ne connaît dans le secteur en dehors du Qatar.