29 avril, 2024
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Rencontre avec Patrick Pourbaix. Ciel bleu, mer belle!

Un salon douillet, un expresso italien et des rencontres  favorisées par le milieu clos d’un paquebot. Le bon moment pour s’entretenir en toute quiétude avec Patrick Pourbaix, DG France de MSC croisières en évoquant les projets massifs en cours et leur justification.

L’homme semble insubmersible. Sourire chaleureux du matin au soir, optimiste de métier ou de conviction si ce n’est les deux. Naviguant avec une aisance parfaite entre ses collaborateurs MSC aussi bien que parmi les quelque 250 agents de voyage métropolitains ou ultra-marins venus partager, certains accompagnés,  une mini-croisière de quatre jours à bord du navire Orchestra, l’un parmi les 22 navires actuels de la compagnie. Un pactole de plus de 20 milliards d’euros pour les chantiers navals de l’Atlantique, constructeurs de 18 des 22 bateaux de MSC qui en attend d’autres en cours de commande ou de finition. Saint-Nazaire a décidément de quoi dérouler le tapis rouge pour MSC.  

Le marasme économique lié à la pandémie de COVID n’a pas atteint tout le monde de la même façon. Pour MSC ce fut même une période faste. Et pour cause : le croisiériste a pu et peut s’appuyer fermement sur la division MSC Cargo, premier armateur mondial de transport de containers d’une puissance financière imbattable. D’où les investissements en cours qui sont aussi un pari raisonné sur l’augmentation prévisible du nombre de croisiéristes, même parmi les Français, traditionnels croisiérosceptiques.

La vision optimiste est de dire qu’avec moins de 600 000 croisiéristes français, le marché ne peut que croître. Il est encore loin des autres marchés en Europe : 3 millions en Allemagne, 2 millions au Royaume-Uni, 1,5 millions en Espagne et en Italie.

MSC va bien merci !

Explora Journeys mise sur le luxe

Ni fanfaronnade, ni fausse-modestie, Patrick Pourbaix annonce que MSC ça va bien merci, ce qui a d’ailleurs encouragé la société à passer commande aux chantiers navals de l’Atlantique de nouveaux bateaux de croisières et de se déployer, depuis peu, autour de projets de dimensions plus confidentielles à visée luxe. L’occasion, pour une profane comme moi de lui demander à quoi correspond cette débauche de nouveaux vaisseaux à venir et quid de leur stratégie de rentabilisation dans un pays, le nôtre, qui est loin d’être le pays le plus fan de croisières.

Il est vrai que tous ces bateaux anciens ou à venir ne sont pas, de loin, destinés qu’à la clientèle française. N’empêche, MSC, comme les autres, aimerait bien en convaincre un plus grand nombre. Alors avec quels moyens ? Patrick Pourbaix mise d’abord sur l’argument « nous sommes une compagnie européenne » avant tout, ce qui est déjà une première marche pour infiltrer les réticences culturelles françaises à l’égard des croisières. Des réticences, explique Patrick Pourbaix, liées surtout au modèle de référence encore très présent dans l’esprit français, celui du faste  à l’ancienne, type croisières Paquet ou celles du France, symboles de l’âge d’or de la croisière. Après ces modèles-là, la décoration aussi bien que le confort à bord se sont américanisés.

Explora Journeys : salle à manger

Pourtant plusieurs croisiéristes aujourd’hui semblent s’orienter vers une image peut-être plus conforme aux fantasmes du monde révolu en question et MSC n’y fait pas défaut. Ses nouveaux navires comportant une partie « yacht club » semblent s’y référer. Ce sont des unités spécifiques, construites à bord des grands paquebots «mass-market » permettant à 250 à 300  passagers de s’offrir un séjour plus privatif à la proue du bateau et dans un univers isolé  et naturellement plus coûteux.

Le quartier chic de la ville flottante en quelque sorte qui n’empêche pas d’aller s’encanailler dans les quartiers populaires à bord.  Il semblerait que la clientèle majoritaire des espaces yacht club soit précisément française. En parallèle, le tout nouveau segment Explora Journeys dont Patrick Pourbaix a pris aussi la tête de l’exploitation depuis mai 2023, abonde dans le même sens. Explora propose exclusivement des suites privées d’un minimum de 34m2, toutes  avec balcons et pour 900 passagers au total.

Explora Journeys

Un segment qui manquait et qui assure un bon équilibre, selon Patrick Pourbaix entre le nombre de passagers et le prix. Explora Journeys, dont le premier vaisseau navigue depuis le mois d’août dernier, veut être l’équivalent des palaces hôteliers à la française mais sur mer et souhaite donc attirer en particulier, la clientèle traditionnelle de ces palaces avec des escales hors des sentiers battus et un service 5*+. A bord, évidemment on mise sur la haute gastronomie, la qualité et le nombre de personnels, l’espace et l’art de vivre à l’européenne pour un tarif d’environ 800 € par jour et par passager.

Une façon espère-t-on d’initier les Français à la croisière autrement. L’équivalent à l’étranger s’apparenterait à des Ritz-Carlton,  Silversea ou Regent aux USA.  Si MSC fournit son appui en infrastructures, une équipe dédiée s’occupe d’Explora que Patrick Pourbaix a pris en charge en plus de MSC. Elle est constituée pour l’heure de deux commerciaux. Une responsable marketing et attendue pour janvier. La marque avait été travaillée jusqu’ici exclusivement auprès d’agences spécialisées dans le luxe. Patrick Pourbaix a rectifié le tir en élargissant à tout type d’agences.

Explora 1 en service depuis cet été

Du club-vacances au palace flottant

Pour autant les très grands navires se développent toujours et assument de plus en plus clairement leur vocation de club-vacances en mer. Une concurrence frontale avec les clubs-vacances traditionnels. Avec un argument de taille : l’excellent rapport qualité-prix que bon nombre d’agents de voyages m’ont confirmé être un argument majeur. A quoi s’ajoutent des attractions et activités à foison pour tous les âges et en même temps une façon de s’initier à la croisière. Trois nouveaux bateaux MSC sont à attendus, l’un d’eux en construction et 3 qui viennent d’être commandés et qui sortiront au rythme d’un par an à partir de 2025.

Nous n’aborderons pas ici l’idée de sur-tourisme et d’écologie même si les efforts en termes d’écologie précisément s’appuient sur des techniques et des énergies nouvelles qui sont convaincantes (engagement pour un objectif zéro émission nette à l’horizon 2050). Reste à mener une réflexion approfondie sur la masse de touristes débarquant en même temps sur certains ports et qui maintiennent le sentiment de rejet  de ceux que les croisières en grand nombre n’attirent pas.

Evelyne Dreyfus

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